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Dansomanie au Prix de Lausanne 2007 / Monique Loudières
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sophia



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MessagePosté le: Mer Fév 14, 2007 3:41 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Egalement en ligne depuis peu sur le site du Prix de Lausanne, la vidéo de la conférence du 31 janvier "Ballet meets business" organisée en collaboration avec IMD (Business School):
http://www.prixdelausanne.org/e/live/video/imd.php

Les participants et la synthèse de la conférence - Fichier PDF:
http://www.prixdelausanne.org/pressrelease/en/BalletBusiness.pdf

Discours de Frank Andersen (Directeur du Ballet Royal du Danemark) - Fichier PDF:
http://www.prixdelausanne.org/pressrelease/en/IMD_Andersen.pdf


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sophia



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MessagePosté le: Jeu Fév 15, 2007 3:18 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Prix de Lausanne 2007 - Dimanche 4 février: Finale

Alors voilà, aujourd'hui, c'est la finale du Prix de Lausanne... Enfin, c'était le 4 février... Une semaine d'entraînement intensif et d'épreuves quasi-quotidiennes, ici même à Lausanne, mais surtout, avant de se retrouver, parfois venus du bout du monde, dans la petite cité du Canton de Vaud, - ce terme du pélerinage des candidats -, des centaines d'heures de travail un peu partout sur la planète, dans les studios de danse de Londres, de Shanghaï, de Séoul, de Lisbonne, de Madrid ou de Munich, pour ne citer que les villes où ont été formés nos finalistes... Et pour parvenir jusqu'à cette semaine, jusqu'à ce jour, jusqu'à cet éphémère moment de gloire que les télévisions diffuseront dans le monde entier, ce sont des milliers de pointes brisées et cassées, de chaussons usés et déchirés, ce sont les mêmes variations apprises, encore et toujours répétées, corrigées, à nouveau répétées, modifiant ici un port de bras, là une inclinaison du buste, et c'est finalement le labeur quotidien du danseur, le métier auquel tous ces jeunes gens se destinent, indéfiniment répété et ressassé. Car il ne faut pas se leurrer, pour parvenir jusque-là donc, ce sont des heures et des heures de préparation, à raison de plusieurs par jour et par semaine, depuis 1 an, 2 ans pour certains, aucun finaliste n'est là par hasard ou par la seule force de son talent!

De la sélection des candidats, on peut parler brièvement et en quelques chiffres. Cette année, sur les 168 candidats (138 filles et 30 garçons) de 33 nationalités différentes inscrits au départ, 66 ont franchi le cap des sélections sur vidéo qui avaient lieu en octobre dernier, 61 étaient réellement présents au début de la compétition qui commence en quart de finale (42 filles et 19 garçons), 25 d'entre eux sont devenus demi-finalistes et le dimanche 4 février, ce sont 12 concurrents qui se retrouvent pour la finale: 6 d'entre eux seront lauréats du Prix, auxquels s'ajoutent deux Prix Spéciaux décernés: celui du Public (le public vote pour le candidat de son choix le jour de la finale) et celui d'Interprétation Contemporaine.

De l'origine des candidats qui se retrouvent en compétition pour cette ultime journée, on peut aussi dire quelques mots. La danse classique est un langage universel, c'est une chose entendue, qui ne le voit à l'examen de la seule liste des participants de ce Prix, tous venus des quatre coins du monde... En revanche, la formation apte à transformer un danseur d'un bon niveau professionnel en un compétiteur susceptible d'être récompensé dans le cadre d'un concours de danse international l'est sans doute beaucoup moins. Outre les diverses écoles chinoises et coréennes dont on connaît les performances dans ce domaine, - et l'on se permettra d'ajouter que la discipline, la persévérance et le travail sans relâche dont font preuve les jeunes danseurs originaires de ces pays constituent des critères de réussite indéniables et dont on ne prend peut-être pas suffisamment la mesure ici, en Occident -, que voit-on dans cette compétition? Ksenia Ovsyanick, biélorusse, English National Ballet School; Charles-Louis Yoshiyama, franco(?)-japonais, English National Ballet School; Delia Mathews, néo-zélandaise, Royal Ballet School; James Hay, britannique, Royal Ballet School; Arai Yoshihisa, japonais, Royal Ballet School. Seuls trois finalistes échappent à cette liste implacable, à cette "main-mise" extrême-orientalo-britannique, l'épithète londonienne serait toutefois plus exacte (quasiment tous les candidats présentés issus des écoles anglaises et londoniennes sont en finale), - un candidat me dira d'ailleurs à ce sujet: "c'est la victoire de Londres!" -. Donc trois candidats seulement, formés tout de même dans des conservatoires européens, font taire les déterminismes: Daniel Vizcayo Martin, du Conservatoire de Madrid; Telmo Moreira, du Conservatoire de Lisbonne; Kono Mai, formée à la Ballet Akademie de Munich. Que dire alors des Français qui, depuis des années, malgré la présence régulière de candidats (il y en avait quatre cette année), se retrouvent incapables d'aligner ne serait-ce qu'un demi-finaliste, - pas en 2007 en tout cas -, a fortiori un finaliste? Trop facile de dire qu'il n'y a pas de candidats issus de l'Ecole de l'Opéra (qui a dit qu'ils se distingueraient pour autant)? José Martinez et Laetitia Pujol venaient-ils d'ailleurs de l'Opéra de Paris lorsqu'ils ont remporté le Prix de Lausanne? Non, il y a bien là, me semble-t-il, une certaine faillite du système français qui est soulevée dans ces déconvenues successives, et que les explications de type psychologique ne sauraient que très imparfaitement et très partiellement justifier...

Les candidats présentent donc jusqu'au bout les trois mêmes variations: le jour de la finale, l'ordre est néanmoins modifié: ainsi, ils commencent par la deuxième variation classique, dansée en tenue d'échauffement, poursuivent avec la variation de Kylian, puis terminent par la première variation classique, revêtus du costume de scène, qu'ils conserveront, brillants de mille feux ou de mille couleurs, pour la remise des prix. Pour le reste, inutile de dire que voir 12 variations signées Kylian (en fait, trois variations différentes au choix sont proposées, pour les filles comme pour les garçons), - même si l'on apprécie beaucoup le chorégraphe -, c'est tout de même une expérience nettement plus aisée à vivre que les 25 qu'il aura fallu parfois subir lors de la demi-finale...

En assistant aux prestations des 12 candidats finalistes, on perçoit et on distingue sans trop de difficultés ceux qui ont une chance de devenir lauréats et ceux qui ne seront "que" finalistes, un statut déjà fort appréciable et méritoire qui leur ouvrira, à n'en pas douter, quelques portes... Ainsi, Daniel Vizcayo Martin, le premier finaliste à se présenter sur la scène, manifestement en retrait par rapport à d'autres candidats, ne montre pas une propreté suffisante (j'entends "propreté" au sens universel du terme, et non au seul sens français, parfois un peu étroit!) dans la variation du Prince de Casse-Noisette et les épaulements ne sont pas assurés correctement dans la variation de James. Sur le sujet des épaulements, je souligne au passage, - profitant notamment de l'évocation de la variation de James choisie par de nombreux candidats -, que seuls James Hay et dans une moindre mesure, Arai Yoshihisa, tous deux de la Royal Ballet School, semblent en avoir une réelle maîtrise. Ksenia Ovsyanick a quelque chose d'encore un peu immature dans sa danse et l'élan, un certain air de grandeur aussi font défaut à sa Swanilda aux bras très raides (serait-ce un défaut récurrent de l'école anglaise?) et à sa Gamzatti. Quant aux deux candidats chinois, si Sun Jia Yong se révèle plus convaincant dans la variation d'Albrecht que Chen Dao Yuan dans la même variation, approximatif et décidément trop excessif dans l'expression des sentiments du personnage qu'il incarne, l'ensemble de leurs prestations est tout de même bien en-deçà du niveau technique d'autres candidats. De même, leurs variations Kylian (Blackbird pour Chen Dao Yuan et Sarabande pour Sun Jia Yong) s'affirment par trop lyriques dans l'interprétation.

En revanche, Arai Yoshihisa, qui se montre surtout excellent dans le registre contemporain et se sort avec les honneurs d'une variation de James exécutée avec une belle musicalité (malgré un costume peu seyant en même temps que bien mal adapté au style de Bournonville: James l'Ecossais devrait tout de même éviter les chaussettes blanches de montagnard suisse et les chemises immaculées à manches bouffantes, car il ne faudrait pas confondre La Sylphide et Les Sylphides! Mr. Green), aurait pu briguer une petite place de lauréat, mais on lui a probablement préféré, - ils sont respectivement cinquième et sixième lauréats -, le talent scénique et le sourire irrésistible de Telmo Moreira, pourtant encore bien vert sur les plans stylistique et technique, ou l'élégance et la présence magnétique d'une Delia Mathews, certes très prometteuse (sa Gamzatti de la finale est vraiment irréprochable), mais encore un peu sèche, en particulier dans le travail des bras. Parmi les autres lauréats, Charles Louis Yoshiyama, le "rebelle" qui avait omis de mettre le collant noir réglementaire pour la variation Kylian des épreuves des quarts de finale en se présentant en pantalon, se montre le meilleur candidat (avec Arai Yoshihisa probablement) dans le répertoire contemporain et son Prix n'est pas usurpé. Tout a déjà été dit sur les candidats classés dans le peloton de tête: les deux jeunes filles, Sae-eun Park et Kono Mai ont réitéré en ce jour de la finale leurs prestations exceptionnelles de la veille, la seule différence étant que là, on savait, on était prévenus... Toutes deux d'une maturité artistique hors du commun, elles pourraient réconcilier bien des récalcitrants avec les compétitions accusées, parfois à juste titre, de ne couronner que les seuls exploits circassiens. James Hay, le meilleur chez les garçons incontestablement, nettement plus convaincant lors de sa finale, aurait mérité la troisième place, juste derrière ces deux jeunes filles intouchables, tant sa personnalité artistique a déjà quelque chose de fascinant. Kim Chaelee, l'autre Coréenne, bien en-deçà à mon avis de sa compatriote comme de la candidate japonaise, a certes montré une très solide technique en Swanilda comme en Raymonda, mais je n'ai pas perçu chez elle, je dois dire, une personnalité et une originalité artistiques particulières; elle ne m'a pas semblé non plus véritablement supérieure à une Delia Mathews, seulement sixième.

A présent que tous les candidats ont dansé, trois fois au total pour chacun d'entre eux, à présent que tout le monde a montré ce qui devait être montré ce jour-là de lui-même, le jury va délibérer pendant une trentaine de minutes... Dans peu de temps donc, le nom des lauréats sera proclamé sur la grande scène du Théâtre de Beaulieu où vont se retrouver tous les membres du jury, les professeurs et les répétiteurs ayant participé à cette 35ème édition du Prix de Lausanne. Dans l'attente des résultats est offert au public une sorte de mini-gala réunissant quelques anciens lauréats du Prix depuis les années 70 jusqu'à la décennie actuelle. Assez peu mémorable le gala, il faut bien le dire, mais est-ce là le but de ce genre de divertissement? Ce que nous garderons de cette journée, ce sont la présence et la personnalité scéniques, le brio artistique, la virtuosité technique de jeunes gens de 16 ou 17 ans qui parviennent, en dépit de circonstances peu propices, - un concours! -, à émouvoir par la somme de leurs talents; ce sont eux donc, dont nous nous souviendrons, eux, plutôt que la prestation des professionnels aguerris... Tout de même, qu'en était-il de cet entracte, non pas dînatoire, mais chorégraphique? Un Pas de deux extrait de la Cendrillon de Jean-Christophe Maillot (lauréat en 1977) bien interprété au demeurant par Paola Cantalupo (lauréate en 1977 également) et Francesco Nappa, mais ne soulevant pas non plus les passions; un solo minimaliste dansé par Megumi Nakamura (lauréate en 1988) dont l'épure stylistique a du mal à trouver sa place dans un tel contexte; l'inévitable Pas de deux du Cygne noir interprété, dans un genre athlétique et peu inspiré, par un couple de l'ABT composé de Marcelo Gomes (lauréat en 1996) et Maria Ricetto, qui nous donnent un avant-goût peu prometteur de la tournée parisienne de la compagnie américaine. Loin, très loin pourtant de ce que nous offriront dans ce même Pas de deux Angel Corella et plus encore la phénoménale Gillian Murphy! En fait, de cet entracte, on aura surtout retenu la prestation hallucinante et hallucinée de Steve McRae (lauréat en 2003) dans un solo extrait de Chroma de Wayne McGregor.

L'heure des résultats sonne à présent. Le rideau du Théâtre de Beaulieu va se baisser dans quelques minutes sur la 35ème édition du Prix. Seul le cocktail de clôture permettra encore de savourer quelques instants supplémentaires auprès de tous ceux qui ont participé d'une manière ou d'une autre à la compétition: les candidats bien sûr, mais aussi leurs familles, les organisateurs, les mécènes, les membres du jury, les professeurs, les répétiteurs, les journalistes, les photographes et tous les amis du Prix de Lausanne... Sur la scène, les candidats échoués en quart de finale ou en demi-finale sont réunis aux côtés du jury, des professeurs et des répétiteurs. Les lauréats sont nommés les uns après les autres et s'avancent désormais timidement et maladroitement pour recevoir leur certificat et la rose qui signent leur victoire dans la compétition. Tout d'un coup, ils redeviennent comme des enfants, dissimulant mal leur émotion. Sae-eun Park, un visage magnifique d'une rare profondeur, est d'une humilité bouleversante. Alignés les uns à côté des autres, leur récompense à la main, ils paraissent soudainement très humains, d'autant plus qu'aucun lauréat, - et ceci est plutôt réjouissant -, ne possède un physique exceptionnel ou hors normes: ils sont tous, sinon de petite taille, de taille très raisonnable...

Et maintenant, se demande-t-on, que vont-ils faire tous? Ils (je parle évidemment des six lauréats) ont reçu chacun une bourse, - elles sont toutes de valeur égale -, qui doit leur permettre de poursuivre leur formation durant un an dans une école prestigieuse ou une compagnie de leur choix, en partenariat avec le Prix de Lausanne, sans avoir à payer de frais de scolarité ou à passer des auditions. Certains aussi, les Anglais notamment, ne viennent là que pour l'honneur et la gloire d'obtenir un Prix reconnu internationalement... Un verre à la main, - on l'a mérité aussi! Mr. Green -, on discute avec quelques candidats heureux ou même moins heureux... Ainsi, la Russe Ekaterina Grazhdankina, déjà diplômée de l'Ecole Vaganova, a voulu venir ici de sa propre initiative; il lui faut à présent trouver un engagement dans une compagnie de ballet à Saint-Pétersbourg, au Théâtre Mariinsky, au Moussorgsky ou ailleurs... Le sympathique Brésilien Junor de Oliveira Souza, toujours très présent dans le théâtre pour soutenir ses camarades et ce, malgré son échec, repart à Londres poursuivre sa formation à l'English National Ballet School: il a aimé participer au Prix, se dit "pas trop déçu", mais ne pense pas revenir l'an prochain. Charles-Louis Yoshiyama termine sa scolarité cette année à l'English National Ballet School lui aussi et doit passer son diplôme en juillet; pour la suite, il ne sait pas encore, mais il aimerait partir à San Francisco ou peut-être rejoindre l'English National Ballet dont il apprécie le directeur Wayne Eagling, même si le répertoire y est peut-être trop exclusivement classique pour lui. Telmo Moreira, le petit Portugais de 15 ans qui ne doit pas dépasser les 1,60m, discute (on se demande bien dans quelle langue!...) avec Irina Sitnikova: il ne cache pas ses ambitions, il veut apprendre dans la meilleure école, et la meilleure école, c'est l'Ecole Vaganova à Saint-Pétersbourg... Delia Mathews, qui a quitté la Nouvelle-Zélande en 2005, à 15 ans, pour étudier à la Royal Ballet School, a encore une année supplémentaire de formation, tout comme James Hay, avant d'obtenir son diplôme. Elle n'a qu'un seul rêve, devenir soliste au Royal Ballet. Quand elle affirme cela, ses yeux brillent du désir de réussir et l'on sent la volonté qui la tenaille, elle, la ballerine venue des antipodes... James Hay, charmant, d'une politesse exquise, entouré de ses professeurs, de sa soeur et de ses parents très fiers de lui, - sa mère me dit qu'aucun d'entre eux ne connaît ou n'a un lien quelconque avec la danse, un vrai miracle donc! - lui aussi, rejoindra le Royal Ballet à la fin de sa scolarité; il a déjà remporté l'an dernier le concours du "Young British Dancer of the Year" et nul doute qu'on l'attend là-bas de pied ferme pour revivifier les troupes anglaises...

Moi aussi, je refais mes valises et m'apprête à quitter Lausanne... En abandonnant derrière moi le Théâtre de Beaulieu, une petite Japonaise m'interpelle et insiste pour se faire prendre en photo à mes côtés par son père (enfin, je suppose...). Je lui précise que je n'étais pas candidate ni membre du jury... Mr. Green, mais peu lui chaut! Je ne saurai jamais la véritable raison... Elle m'explique qu'elle vient d'Osaka, qu'elle est la candidate n°4 (!) et qu'elle n'a pas franchi les quarts de finale. Mais l'année prochaine, elle veut revenir à Lausanne. Je regarde ma liste: Riho Fujita, 15 ans et quatre mois, Japon. J'avais entouré son numéro il y a quatre jours, histoire de me souvenir que la variation de la 2ème soliste de La Bayadère qu'elle avait répétée m'avait bien plu... Peut-être l'avait-elle alors deviné... Quoiqu'il en soit, à l'année prochaine, Melle Riho Fujita! Laughing




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Katharine Kanter



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MessagePosté le: Jeu Fév 15, 2007 4:26 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Merci de ce commentaire fort bien écrit et prenant.

Quant à la non-présence de la France, pourquoi chercher midi à 14 heures?

A part l'école de l'Opera, qui n'encourage pas, je crois, ses élèves à y participer en raison du temps de préparation effarant auquel Mlle. Sophia a justement fait référence, il reste peu d'institutions en France capables de produire des gens du niveau adéquat.

D'abord, en raison de la prédominance écrasante de la danse dite "contemporaine" en France.

Et ensuite, parce qu'il faut bien que quelqu'un paie pour tout cela.

Or, 75% de la population française - ceux qui ont encore du travail (!) - gagnent moins de 1500 euros par mois.

Qui dit niveau de vie aussi bas, dit bientôt niveau culturel à l'avenant.

Préparer et participer à ce Concours, si l'on inclut les voyages, les hôtels, les repas, les costumes, les chaussons, les cours particuliers, les pianistes de répétition, la kinesthérapie, les individus qui doivent eux aussi voyager pour accompagner le danseur (ce sont des mineurs!), etc. etc. doit, pour un particulier hors-institution, coûter dans les 10 000 euros - près d'un an du salaire moyen français.

Donc, plusieurs années d'économies très dures, pour un couple de parents à trouver pour couvrir les 4 jours du Concours.

Si un individu est sélectionné sur le video envoyé d'avance, les organisateurs du Concours subventionnent-ils son voyage? Son hôtel?

En tout cas, cela me semble évident que peu de parents français, aussi motivés qu'ils soient, pourraient songer aujourd'hui à encourrir une telle dépense.


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sophia



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MessagePosté le: Ven Fév 16, 2007 1:02 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Prix de Lausanne 2007 - Photographies des lauréats par Jean-Bernard Sieber (photographe officiel du Prix de Lausanne)


Sae-eun Park (Corée du Sud) - "Bourse d'étude" - Variation classique 1: La Bayadère, Gamzatti
Photographe J-B Sieber



Sae-eun Park (Corée du Sud) - "Bourse d'étude" - Variation classique 2: Giselle, Paysans
Photographe J-B Sieber



Sae-eun Park (Corée du Sud) - "Bourse d'étude" - Variation Kylian: Blackbird
Photographe J-B Sieber



Mai Kono (Japon) - "Bourse d'étude" et "Prix du Public" - Variation classique 1: Raymonda, Tableau du Rêve
Photographe J-B Sieber



Mai Kono (Japon) - "Bourse d'étude" et "Prix du Public" - Variation classique 2: Grand Pas classique
Photographe J-B Sieber



Mai Kono (Japon) - "Bourse d'étude" et "Prix du Public" - Variation Kylian: One of a kind
Photographe J-B Sieber



Chaelee Kim (Corée du Sud) - "Bourse d'étude" - Variation classique 1: Raymonda: Tableau du Rêve
Photographe J-B Sieber



Chaelee Kim (Corée du Sud) - "Bourse d'étude" - Variation classique 2: Coppélia: Swanilda
Photographe J-B Sieber



Chaelee Kim (Corée du Sud) - "Bourse d'étude" - Variation Kylian: Blackbird
Photographe J-B Sieber


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sophia



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MessagePosté le: Ven Fév 16, 2007 1:37 pm    Sujet du message: Répondre en citant


James Hay (Grande-Bretagne) - "Bourse d'étude" - Variation classique 1: Don Quichotte, Basilio
Photographe J-B Sieber



James Hay (Grande-Bretagne) - "Bourse d'étude" - Variation classique 2: Grand Pas classique
Photographe J-B Sieber



James Hay (Grande-Bretagne) - "Bourse d'étude" - Variation Kylian: 27'52", Piers solo
Photographe J-B Sieber



Telmo Moreira (Portugal) - "Bourse d'étude" - Variation classique 1: La Sylphide, James
Photographe J-B Sieber



Telmo Moreira (Portugal) - "Bourse d'étude" - Variation classique 2: Coppélia, Frantz
Photographe J-B Sieber



Telmo Moreira (Portugal) - "Bourse d'étude" - Variation Kylian: Sarabande
Photographe J-B Sieber



Delia Mathews (Grande-Bretagne) - "Bourse d'étude" - Variation classique 1: La Bayadère, Gamzatti
Photographe J-B Sieber



Delia Mathews (Grande-Bretagne) - "Bourse d'étude" - Variation classique 2: La Bayadère, 3ème soliste
Photographe J-B Sieber



Delia Mathews (Grande-Bretagne) - "Bourse d'étude" - Variation Kylian: 27'52", Paris solo
Photographe J-B Sieber



Charles-Louis Yoshiyama (Japon) - "Prix d'interprétation contemporaine" - Variation classique 1: Don Quichotte, Basilio
Photographe J-B Sieber



Charles-Louis Yoshiyama (Japon) - "Prix d'interprétation contemporaine" - Variation classique 2: Grand Pas classique
Photographe J-B Sieber



Charles-Louis Yoshiyama (Japon) - "Prix d'interprétation contemporaine" - Variation Kylian: 27'52", Piers solo
Photographe J-B Sieber


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sophia



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MessagePosté le: Jeu Mar 01, 2007 5:12 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Encore des photos du Prix de Lausanne (Finale - 4 février):
http://www.nobrakes.ch/prixdelausanne2007.php

Et deux petites interviews à venir... Patience... Wink


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sophia



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MessagePosté le: Dim Mar 04, 2007 12:41 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Sur le forum japonais, j'ai indiqué ce lien vers un site http://www.kk-video.co.jp/ où l'on peut visionner de nombreuses vidéos de concours. Voici donc Mai Kono (2ème à Lausanne et Prix du Public) dans divers concours au Japon, c'était pour l'essentiel en 2004, elle avait donc 14 ans!!
Variations: La Belle au bois dormant et La Esmeralda
http://www.kk-video.co.jp/concours/saitama2004/movie/cj-2-2.mov
http://www.kk-video.co.jp/concours/tokyo2004/movie/ba-jr-3.mov
http://www.kk-video.co.jp/concours/ajbu2004/movie/jr2-1.mov
http://www.kk-video.co.jp/concours/nba2004/movie/jh1-1.mov
http://www.kk-video.co.jp/concours/saitama2005kekka/movie/cj-1.mov


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laurence



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MessagePosté le: Dim Mar 04, 2007 6:38 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Je ne sais pas ce qu'en pensent les "grands" mais nous assistons là à la naissance d'un" chemin d'étoile"


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sophia



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MessagePosté le: Sam Mar 10, 2007 1:50 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Prix de Lausanne 2007 – Rencontre avec Jean-Pierre Bonnefoux (Président du Jury du Prix de Lausanne 2007) et Irina Sitnikova (Membre du Jury du Prix de Lausanne 2007)

Durant toute la semaine que dure le Prix de Lausanne, le jury se retrouve évidemment fort sollicité par les nombreuses épreuves de sélection qui se déroulent quotidiennement. Difficile dans ces conditions de rencontrer dans les premiers jours de la compétition les membres du jury, jusqu’à ce que la proclamation des résultats des demi-finales les libère momentanément de leurs obligations. C’est donc entre la demi-finale du samedi et la finale du dimanche que nous avons pu discuter avec Jean-Pierre Bonnefoux, Président du Jury du Prix de Lausanne 2007, et Irina Sitnikova, membre de ce même jury.

Jean-Pierre Bonnefoux, ancien danseur Etoile de l’Opéra de Paris dans les années 60, reste probablement dans la mémoire de tous les amateurs de ballet, qu’ils aient l’âge ou non de l’avoir vu danser. On se souvient notamment qu’il avait participé en 1965 à la création d’une œuvre importante du répertoire de l’Opéra de la seconde moitié du XXème siècle, en l'occurrence le ballet de Roland Petit Notre-Dame de Paris, aux côtés de Claire Motte, Cyril Atanassoff et Roland Petit lui-même. Depuis 1970, il vit et travaille aux Etats-Unis, ce dont témoigne aujourd’hui un langage et une expression agréablement fleuris.

Le lien entre Jean-Pierre Bonnefoux et le Prix de Lausanne est ancien puisqu’il y participe quasiment depuis sa création, en 1973. A ce sujet, on peut même parler d’une histoire d’amitié. En effet, le fondateur du Prix de Lausanne, Philippe Braunschweig (industriel suisse amateur de ballet, dont l’épouse, Elvire Kremis, est une ancienne ballerine d’origine russe), se trouvait être un ami à lui et c’est ainsi qu’il a été amené à y participer, d’abord comme simple membre du jury, puis comme répétiteur (il l’a été durant deux années), et enfin comme président, fonction qu’il assume pour la troisième fois. Il ne manque pas de vanter les mérites de ce Prix, qu’il juge unique, car il se préoccupe avant tout du bien-être des danseurs, plus que de l’obtention de médailles. Les modalités de sélection des candidats ont évolué et la vidéo notamment a fait son apparition: désormais les candidats sont sélectionnés en amont de la compétition sur une vidéo d’eux-mêmes dans un solo et arrivent à Lausanne directement en quart de finale. Jean-Pierre Bonnefoux précise que ce nouveau mode de sélection s’explique essentiellement par des motifs financiers. Auparavant, les candidats étaient aux environs de 120 au départ et se retrouvaient dès le deuxième ou le troisième jour à 60 en quart de finale, c’est donc pour contourner les frais énormes, et vains, engagés par nombre de candidats pour participer à cette compétition que le mode de sélection a été modifié. La spécificité du Prix de Lausanne étant d’offrir à ses lauréats des bourses d’étude dans des écoles prestigieuses, des démarches ont été faites ces dernières années par les organisateurs en direction de l'Amérique du Sud et de l'Australie pour amener à Lausanne des candidats venus de ces continents éloignés, et ainsi, cette année, huit candidats se trouvaient être originaires d’Australie, tandis que trois venaient d’Amérique du Sud (un du Paraguay, deux du Brésil, auxquels on peut ajouter un candidat mexicain). En revanche, les candidats asiatiques sont bien présents depuis les débuts du Prix de Lausanne, en 1973. Sur les qualités de ces derniers, Jean-Pierre Bonnefoux évoque, outre leur nombre important qui constitue en soi une force, leur esprit de compétition, leur discipline, et de manière plus intéressante, leur unité de technique et d’enseignement, en l’occurrence l’école russe, qui constitue chez eux une base très forte. Toutefois, il nous dit regarder plus l’individu que la nationalité et s’affirme peu intéressé par les spécificités nationales.

Jean-Pierre Bonnefoux dirige actuellement, et depuis 1996, une compagnie en Caroline du Nord, le « North Carolina Dance Theater », sise à Charlotte, une ville qui se trouve être le deuxième plus grand centre financier d’Amérique, avant même San Francisco. Il dit adorer le contemporain (terme à comprendre, semble-t-il, dans un sens plus américain qu’européen…), et sa compagnie présente un répertoire diversifié qui va de Petipa à Forsythe, en passant par Balanchine - dont il remonte les œuvres en compagnie de sa femme Patricia Mac Bride, ancienne muse de Balanchine - Nacho Duato, Alvin Ailey ou Paul Taylor.

Cela fait désormais près de quarante ans qu’il a quitté la France et l’Opéra de Paris dont il était danseur Etoile et il nous rappelle ainsi les circonstances de son « exil » américain en 1970: il se trouvait alors à Berlin où il travaillait avec Balanchine; amené à faire un remplacement sur Apollon, il prit conscience au bout de quatre jours qu’il se devait d’évoluer et de progresser sous la férule d’un maître, et ce maître, il l’avait trouvé en la personne de George Balanchine. Il quitta donc l’Europe pour le New-York City Ballet dont il devint « Principal » dès 1970 et y dansa pendant plusieurs années les œuvres de Balanchine (il a dansé son dernier spectacle en 1980), avant de devenir professeur à la School of American Ballet en 1977. Outre l’influence que Balanchine a pu avoir sur des chorégraphes majeurs de notre temps comme William Forsythe ou Merce Cunningham, il met en avant la musicalité du chorégraphe et la très grande clarté visuelle qui se détache de ses ballets. Alors - peut-on raisonnablement se demander - pourquoi Balanchine est-il absent du Prix de Lausanne ? Jean-Pierre Bonnefoux ne nous parlera évidemment pas des tarifs exhorbitants qu’exigeraient probablement le Balanchine Trust si des variations extraites de ses ballets étaient proposées aux candidats, il nous indiquera simplement que les enchaînements (les candidats présentent des enchaînements classiques et contemporains devant le jury qu’ils apprennent en même temps que se déroule l'épreuve) proposés aux garçons cette année étaient fortement inspirés du style balanchinien. Certes il aimerait beaucoup que les chorégraphies de Balanchine soient réellement au programme du Prix de Lausanne, d’autant plus qu’il est dansé dans à peu près toutes les compagnies classiques au monde, mais c’est Jiri Kylian qui a été choisi pour les variations contemporaines (il s’agit de variations non extraites de ballets connus, mais bien de chorégraphies créées spécialement pour les candidats du Prix de Lausanne).

Pour Jean-Pierre Bonnefoux, Kylian est simplement le meilleur chorégraphe d’aujourd’hui. Il nous avouera d'ailleurs préférer voir dansées plusieurs variations signées Kylian plutôt qu'assister à une énième série de variations extraites du Don Quichotte, par exemple, ce grand classique de tous les concours de danse (bien que ce choix ait été assez limité cette année à Lausanne). Avant que soit imposée une variation de Kylian au concours, il existait une épreuve de variation libre, mais elle s’avérait très difficile à juger, en raison de la trop grande diversité des choix faits par les candidats. Pour ce qui est de Kylian, la plupart des candidats n’en ont jamais entendu parler, ils sont malheureusement très fermés. Une candidate lui avait ainsi avoué qu’elle avait pris la variation la plus courte, car elle trouvait ce style très ennuyeux, mais en répétant cette chorégraphie, elle a réussi à découvrir autre chose et a fini par devenir une passionnée de Kylian. C’est de voir les danseurs progresser et évoluer qui lui procure le plus grand plaisir. Les œuvres de Kylian sont à la fois d’une simplicité, d’une clarté extraordinaires et d’une grande profondeur. Il n’y a rien de fabriqué chez lui, c’est pourquoi, pour l’interpréter de manière convaincante, on ne peut pas faire dans le drame ou le sentiment: c’est cela la grandeur - et la difficulté - de Kylian.


La compagnie dirigée par Jean-Pierre Bonnefoux, le "North Carolina Dance Theater":
http://www.ncdance.org/





[A suivre avec Irina Sitnikova...]


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sophia



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MessagePosté le: Dim Mar 11, 2007 1:29 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Le nom d’Irina Sitnikova est sans aucun doute moins connu du public français que celui de Jean-Pierre Bonnefoux. Sa carrière est pourtant riche et pour le moins prestigieuse. Formée à l’Ecole de danse de Saratov en Russie dont elle sort diplômée en 1977, Irina Sitnikova est d’abord engagée en tant que soliste au Ballet classique de Moscou (dirigé par Natalia Kassatkina et Vladimir Vassiliev), puis dans les années 80 et 90, elle est soliste du Ballet du Théâtre Mariinsky où elle dansera durant 23 ans tous les grands rôles du répertoire classique. Arrivée au terme de sa carrière de danseuse, elle se tourne vers la pédagogie et suit la formation de professeur à la Faculté Pédagogique de l’Académie Vaganova à Saint-Pétersbourg. Depuis 1997, elle enseigne donc la danse classique dans les divisions supérieures à l’Académie Vaganova où elle a été nommée Pédagogue en chef de la danse classique en 2001. C’est à ce titre qu’elle a été amenée à participer au Prix de Lausanne, pour lequel elle a d’abord été conviée comme professeur. A présent, elle est membre du jury pour la seconde fois, un rôle qu’elle remplit avec beaucoup de plaisir, car malgré le fait qu’elle se trouve là pour apprécier et juger des enfants, elle aime aussi à apprendre en les regardant danser.

Bien qu’étant professeur dans une école prestigieuse aux spécificités techniques et stylistiques bien marquées, Irina Sitnikova a parfaitement conscience que les jeunes danseurs participant au Prix de Lausanne sont tous très différents et ont reçu des formations variées. Elle effectue fréquemment des voyages un peu partout dans le monde et connaît bien les différentes écoles, la diversité des enseignements et des styles. En tant que membre du jury d’un concours comme le Prix de Lausanne, elle n’attend donc pas des candidats qu’ils aient, pour faire court, le « style Vaganova ». Quelles sont donc alors ses attentes à elle, et plus généralement celles du jury de Lausanne, vis-à-vis de candidats venus du monde entier? Tout d’abord – cela va de soi – un cursus et un niveau professionnels ; ensuite, la musicalité et une personnalité artistique: Irina Sitnikova définit la personnalité artistique comme la capacité à exprimer ses sentiments, ses émotions sur scène - et non lors de la classe - même dans un mouvement aussi simple qu’un battement tendu. Parfois, on voit des jeunes filles danser le sourire aux lèvres, mais le visage reste figé et c’est un sourire sans vie qu’il y a au milieu de leur visage. Il existe bien sûr des différences d’appréciation en ce qui concerne la personnalité artistique, mais dans la conception propre à l’école russe, on peut dire que le danseur la possède lorsque des coulisses à la scène se propage comme un courant, une force, une énergie qui converge en direction du public.

Irina Sitnikova évoque également le rapport existant entre ces deux instances distinctes et néanmoins intrinsèquement liées que sont l’école, la formation, l’éducation d’une part, et le théâtre, le monde de la scène, la vie artistique d’autre part, en partant de l’exemple qu’elle connaît le mieux, à savoir l’Académie Vaganova, lieu d’un enseignement très strict sur le plan technique, et le Ballet du Mariinsky, lieu d’expression artistique, qui en constitue le prolongement naturel et logique. Après l’obtention du diplôme, seuls les meilleurs des élèves de l’Académie Vaganova sont engagés au Mariinsky. Les enfants n’ont qu’une envie, c’est de rejoindre la troupe de ce théâtre, ils ne rêvent certainement pas d’aller ailleurs. Ce n’est qu’au bout d’un an ou deux passés au Mariinsky qu’ils changent. Parce que ce sont les meilleurs qui ont été engagés au Mariinsky, être un simple membre du corps de ballet du Mariinsky signifie pour eux être l’équivalent d’une Etoile ailleurs. Mais pour être une Etoile au Mariinsky, il ne suffit pas d’avoir le niveau physique - car on peut toujours travailler cet aspect par des exercices d’assouplissement, d’étirement, etc…– il faut aussi avoir une forte personnalité, et çà, tout le monde ne peut pas l’avoir. C’est pourquoi, à un certain niveau, c’est la personnalité qui prime sur le physique. Pour devenir soliste, c’est un ensemble de qualités qui est nécessaire, au premier rang desquelles elle place la personnalité. Mais au début, le physique a également son importance, évidemment ; lors des épreuves des demi-finales, par exemple, il y avait une candidate qui avait et la personnalité et la technique, mais il lui manquait malheureusement quelque chose d’essentiel pour le ballet classique: une longueur de jambes.

Pour en revenir plus directement au Prix de Lausanne, on rappellera qu’il sélectionne à présent ses candidats sur vidéo, mais qu’il propose également à ceux-ci, dans le cadre de leur préparation, des vidéos des variations interprétées par d’anciens lauréats. La question peut alors se poser de voir de jeunes candidats copier une interprétation plutôt que s’approprier une chorégraphie. Il s’agit d’une vraie question de fond pour Irina Sitnikova: d’après elle, les vidéos sont de bonne qualité, mais le problème est en effet plus vaste et se pose avec plus d’acuité pour l’école russe de ballet: si l’on prend comme exemple le répertoire russe, le répertoire de Petipa, et notamment un ballet comme Raymonda, dont une variation, celle du Rêve, est proposée aux candidates, on peut se demander pourquoi tout le monde les apprend en s’appuyant sur l’interprétation de telle ou telle ballerine occidentale, et non d’après ce qu’on fait au Mariinsky, alors que ce théâtre est le seul à préserver la tradition de Petipa des influences extérieures. Par exemple, les chorégraphies de Nouréev ne sont pas correctes sur le plan musical. Chez les Russes, ce qu’il y a de bien et de pratique, c’est que dès l’école les enfants apprennent le style et une fois qu’ils se retrouvent engagés dans un théâtre, ils savent danser Petipa, qui n’a pas besoin d’être adapté.

Toujours au sujet des variations proposées aux candidats, certaines sont incontestablement beaucoup plus difficiles – notamment celles tirées de Raymonda ou de Don Quichotte – ou plus longues que d’autres. S’agit-il alors pour le jury d’en tenir compte ? De même, comment fait-on pour juger une variation contemporaine signée Kylian , dansée par de jeunes adolescents qui, pour la plupart d’entre eux, ignorent tout de ce style? Irina Sitnikova se rend bien compte de la difficulté d’appréciation, sur un plan technique, lorsqu’on se retrouve face à des candidats présentant des variations qui n’offrent pas toutes les mêmes difficultés, mais cela n’est pas de son fait, c’est un point qui dépend aussi du comité d’organisation qui s’occupe de la sélection. En ce qui concerne Kylian, qu’elle considère comme un très grand chorégraphe, elle a néanmoins un point de vue particulier sur la question qu’elle ne partage pas forcément avec tout le monde. Il lui faut admettre que beaucoup de candidats ne comprenaient pas ce qu’ils dansaient et que leur prestation était ennuyeuse.

Pour en revenir à l’origine des candidats, si l’Ecole Vaganova offre des bourses d’étude aux lauréats, en revanche très peu de Russes sont candidats à Lausanne (phénomène que l’on ne retrouve pas par exemple avec les Anglais, élèves d’écoles prestigieuses, et pourtant présents à Lausanne). Cette année, il y avait toutefois une candidate issue de l’Ecole Vaganova, dont Irina Sitnikova nous dit qu’elle qu’elle y a déjà terminé son cursus, qu’elle n’en était pas la meilleure élève et que sa présence à Lausanne était avant tout le fruit d’une décision personnelle, personne ne lui ayant conseillé d’être candidate. Au passage, la jeune fille n’a pas dépassé le stade des quarts de finale. Si les Russes sont si rares à Lausanne, c’est que la récompense pour les lauréats, ce n’est pas de l’argent, mais des bourses d’étude pour se former ailleurs et les Russes - si l’on prend par exemple ceux de l’Académie Vaganova, qui est l’une des meilleures écoles au monde pour l'apprentissage du ballet classique et où elle se dit très fière d’enseigner, tant de danseurs fameux en sont issus! - veulent bien gagner, mais pas changer d’école ou aller voir ce qui se passe à l’étranger. Leur seul objectif est d’entrer dans la troupe du Mariinsky! Néanmoins, la directrice artistique de l’Ecole, Altinay Asylmuratova, a un immense respect pour cette compétition dont elle a été membre du jury à deux reprises et elle y envoie toujours des professeurs. En retour, des lauréats choisissent l’Académie Vaganova pour poursuivre leur formation; on citera notamment le cas récent d’une jeune Coréenne, venue se perfectionner en Russie, et qui s’est révélé un excellent élément.


Le site de l'Académie Vaganova où enseigne Irina Sitnikova:
http://www.vaganova.ru/



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haydn
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MessagePosté le: Jeu Avr 12, 2007 11:30 am    Sujet du message: Répondre en citant

Un dossier spécial réunissant les reportages et interviews réalisés par Sophia est à présent en ligne sur le site, avec une présentation plus soignée et des vignettes cliquables pour les albums photo :


Dansomanie au Prix de Lausanne 2007


Accessible aussi par la rubrique "Dossiers thématiques" sur la page d'accueil de www.dansomanie.net


A noter à l'attention de nos amis japonais que la finale du Prix de Lausanne sera diffusée intégralement sur NHK (télévision publique nippone) le 28 avril prochain.


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mizuko



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Localisation: tokyo

MessagePosté le: Ven Avr 13, 2007 7:18 am    Sujet du message: Répondre en citant

Thanks haydn!!! I have already announced about the broadcasting in the dansomanie en japonais. It's 15:00 - 17:00 Saturday 28 April 2007 (JT) on NHK educational channel (channel 3). I am very looking foward to watching it. Wink


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sophia



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MessagePosté le: Ven Avr 13, 2007 6:26 pm    Sujet du message: Répondre en citant

En attendant le prochain Prix de Lausanne qui se tiendra du 28 janvier au 3 février 2008, il est désormais possible de commander les DVDs de la demi-finale (26 francs suisses + frais d’envoi) et/ou de la finale (32 francs suisses + frais d’envoi) à présent disponibles.

Bon de commande: http://www.prixdelausanne.org/pdf/dvd07_commande.pdf

Order form: http://www.prixdelausanne.org/pdf/dvd07_orderform.pdf


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gene



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Messages: 17
Localisation: narbonne

MessagePosté le: Dim Avr 15, 2007 9:46 am    Sujet du message: Répondre en citant

merci Sophia pour ce reportage passionnant et ces renseignements !
Irina Sitnikova était une très belle danseuse en effet , que l ' on peut toujours voir sur certains DVD comme dans le pas de trois de Paquita , dans Markitenka , et aussi il me semble dans La Belle au Bois Dormant , je ne sais plus trop dans quel rôle , peut être une des Pierres précieuses ?
Merci encore et bravo pour ce travail qui profite à tous!


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sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22087

MessagePosté le: Dim Avr 15, 2007 7:32 pm    Sujet du message: Répondre en citant

C'est exact, elle interprète le rôle de la Fée Or (il n'y a pas de pierres précieuses dans La Belle au bois dormant du Kirov, mais un pas de quatre avec les Fées Diamant, Saphir, Or et Argent à l'acte III) dans La Belle au bois dormant (1989) avec Larissa Lezhnina et Farukh Ruzimatov, j'avais complétement oublié, merci de le rappeler! Wink

Pour ce qui est des autres prestations filmées d'Irina Sitnikova, plus connues peut-être, on peut en effet la voir aux côtés d'Elena Pankova et Grigory Chicherin dans le Pas de trois du Grand Pas de Paquita enregistré en 1991 (à droite de l'écran durant l'entrée):
http://www.dropshots.com/madpaxpdt

On la voit également dans l'enregistrement du Pas de six de La Vivandière de 1991 avec Elena Pankova et Sergeï Vikharev:
http://www.youtube.com/watch?v=m7YKPeEuqTY
http://www.youtube.com/watch?v=m3K2wailMH0

Ou encore dans le rôle de Moyna dans cette Giselle de 1994 avec Altinay Asylmuratova (Giselle), Ulyana Lopatkina (Myrtha), Elvira Tarasova (Zulma):
http://mariinsky.livejournal.com/743298.html


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