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Ballett der Wiener Staatsoper und Volksoper
27 octobre 2008 : Max und Moritz, de F. Barbay et M. Kropf, à la Volksoper (Vienne)
Les
personnages de Max et Moritz, créés en 1865 par
l’illustrateur Wilhelm Busch, tiennent, dans l’imaginaire
enfantin germanique, une place analogue à celle de Zig et Puce, d’Alain Saint-Ogan, en France, ou des Katzenjammer Kids,
de Rudolph Dirks, en Amérique du Nord. Les mauvais coups
perpétrés par les deux garnements – Max, le brun et
Moritz, le rouquin – sont narrés dans un unique album
divisé en sept chapitres, consacrés chacun à
l’une de leur farces («Streicher»).
L’idée de porter à la scène les aventures de
Max et Moritz n’est en soi pas neuve. Les premières
tentatives remontent à 1930 (Vienne), et 1932 (Moscou), suivies
d’entreprises similaires en Angleterre, en Allemagne et en Suisse.
La version qui a fait son entrée à la Volksoper en 2007
trouve son origine dans la pièce imaginée par Edmund
Gleedes pour le Ballet de Bavière, à Munich, en 1984.
L’ouvrage initial a bénéficié de nombreuses
améliorations : nouveaux décors, costumes refaits,
remaniement d’une partie de la chorégraphie et surtout,
remplacement de la musique enregistrée par un vrai orchestre. La
trame sonore est constituée de pages célèbres de
Rossini (La Pie voleuse, Guillaume Tell, Le Siège de Corinthe, Le Voyage à Reims, Le Barbier de Séville, Sémiramis…) en partie ré-instrumentées par Béla Fischer, et de citations de la Boutique fantasque,
d’Ottorino Respighi – elle-même un pastiche de
mélodies du Signor Vacarmi. L’ensemble est très
enlevé, vivant, et convient finalement plutôt bien
à l’univers délirant de Max et Moritz.
Alexej Khludov (Max) et Dumitru Taran (Moritz)
La chorégraphie, révisée par Michael Kropf et Ferenc Barbay,
tous deux anciens interprètes de la création munichoise en 1984, suit avec une
grande fidélité l’histoire et la structure de l’album originel de Wilhelm
Busch, et préserve la division en sept parties précédées d’un prologue. Seule
concession à l’air du temps, l’épilogue, où Max et Moritz, après avoir été
promptement réduits en farine dans un moulin à blé – à la plus grande joie des
victimes de leurs tours pendables – renaissent sous la forme de deux jeunes enfants
prêts à prendre la relève des sacripants trépassés. On aura peut-être voulu ici
atténuer la cruauté d’une fable très peu «politiquement correcte», mais fort
réjouissante en une époque où la compassion larmoyante tient lieu de morale
universelle.
Toutes les figures secondaires nées sous le pinceau de Wilhelm Busch
sont également présentes sur la scène du Volkstheater : la Veuve Bolte,
incarnée par Samuel Colombet, au comique inénarrable, Böck, le tailleur
(Florian Hurler), son épouse (Silvia Schreger), l’Oncle Fritz (Percy Kofranek),
le boulanger (Adrian Cunescu), Maître Müller, le meunier sadique (Andrej Milo),
Mecke, le paysan revanchard et borné (Oleksandr Maslyannikov), ainsi que
Lämpel, le maître d’école lunatique (Vladimir Snizek), favori incontestable du
jeune public présent en grand nombre dans l’assistance.
Silvia Schreger (Frau Böck) et Florian Hurler (Schneieder Böck)
Cependant,
l’une des trouvailles les plus réussies des concepteurs du
spectacle est d’avoir su donner consistance à Spitz, le
chien stupide et snob, personnifié par un Gleb Shilov
facétieux, et d’une incroyable laxité.
Des deux personnages principaux, aucun ne démérite, mais
Max, interprété par Alexej Khludov (qui succède
notamment à Daniil Simkin dans ce rôle), domine les
débats de par son inépuisable énergie, sa
présence scénique et son sens du «show»,
qualités que l’on retrouve également chez Silvia
Schreger, une Fraü Böck exubérante et enthousiasmante.
Le corps de ballet, qui apparaît sous d’improbables
déguisements de pompiers, de poulets, de femmes de ménage
ou encore de cygnes – pour un bref clin d’œil
«pédagogique» - s’investit lui aussi avec
beaucoup d’entrain dans cette diabolique pochade, à
l’image des élèves de l’école de danse
et de la maîtrise de l’Opéra de Vienne, tour
à tour canetons, hannetons ou écoliers.

Tutti
Ce
petit monde s’ébat dans une astucieuse scénographie
conçue par Manfred Waba ; s’inspirant avec
fidélité du graphisme de Wilhelm Busch, elle se
présente sous la forme d’une bibliothèque occupant
tout le pourtour du plateau. A chacune des travées de la
bibliothèque correspond un chapitre de l’album de Max und Moritz.
Le développement du ballet s’apparente ainsi au
feuilletage des sept sections du livre et est prétexte à
une accumulation de gags impertinents et incisifs. Quelques effets
spectaculaires, tels l’incendie de l’école, viennent
opportunément pimenter l’ouvrage ici ou là.
Enfin,
last but not least, on louera la qualité de l’orchestre de
la Volksoper, placé sous la direction de Gerrit Preißnitz,
et tout a fait digne de son «grand frère» de la
Staatsoper. Un bien beau spectacle donc que ce Max und Moritz,
qui sans infantilisme aucun, nous permet par la seule magie du
théâtre de faire revivre, le temps d’un soir, les
souvenirs d’un paradis à jamais perdu.
R. F. © 2008,
Dansomanie
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Max et Moritz |
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La veuve Bolte |
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Le chien Spitz et la veuve Bolte |
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Le tailleur Böck |
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Le tailleur Böck et sa femme |
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L'oncle Fritz |
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